Le dernier film de Michael Moore ne bénéficie pas que de critiques favorables, pour ne pas changer. La différence, c'est que cette fois-ci, certains l'accusent d'avoir travesti la vérité, en particulier quand il parle du système de santé français (Télé 7 jours : "Si l'on admire toujours sa faconde offensive, il élargit hélas son enquête à la France. Et, en terre inconnue, il avance des sottises et surligne son trait", Ouest France : "(...) son système d'attaque s'autodétruit car la manière angélique dont il raconte une France paradisiaque enlève toute crédibilité au reste").
Après l'avoir regardé, je n'ai rien vu de particulièrement mensonger dans ce film. Quand il dépeint le système de santé français, il omet effectivement de parler du ticket modérateur (ce qu'il fait pourtant quand il parle du système britannique) ou de l'euro obligatoire en consultation, tout en n'affirmant pas, comme beaucoup de médias le prétendent, qu'en France, tout est gratuit. Cela change-t-il fondamentalement quelque chose au propos ? Evidémment non. La critique fondamentale qu'il émet à l'encontre du système étatsunien reste tout à fait valable (pour comparer : on parle à un moment d'un Canadien qui est parti en vacances aux Etats-Unis, et qui, parce qu'il s'était blessé, s'est retrouvé avec une facture 600.000 dollars pour 3 jours d'hospitalisation). Et les systèmes de santé d'autres pays dont le film parle (Canada, Royaume-Uni, France, Cuba) ne servent qu'à démontrer qu'un système aussi mauvais n'est pas une fatalité. L'exemple de Cuba est évidémment particulièrement piquant, étant donné qu'il s'agit d'un pays du Tiers-Monde et d'un ennemi des Etats-Unis, sous embargo depuis 50 ans (la scène où une des secouristes du 11 septembre que Michael Moore a emmené avec lui voit l'inhalateur qu'elle achète 120 dollars aux Etats-Unis vendu l'équivalent de 5 cent à La Havane et fond en larmes, car elle n'a qu'une pension de 1000 dollars par mois, est difficile à supporter C'était tellement visiblement spontané et pas prévu que j'en ai eu moi-même les larmes aux yeux, je l'avoue). Cela n'empêche pas ce pays d'avoir un système de santé bien supérieur à celui des Etats-Unis.
En clair, le propos de Michael Moore quand il parle des systèmes de santé au Canada, au Royaume-Uni, en France ou à Cuba, n'est nullement de se livrer à une analyse poussée de ces sytèmes, mais simplement de prouver qu'il existe des alternatives au catastrophique système étatsunien (qui est son sujet principal), qui, elles, semblent fonctionner de manière satisfaisante.
Ces critiques donnent la désagréable impression de chercher à toute force à déconsidérer le propos de Michael Moore, en utilisant tous les arguments disponibles, peu nombreux pourtant. On peut se demander ce qui motive cette attitude.
Après avoir parlé du film, j'aimerais parler brièvement de la situation qu'il montre :
Aux Etats-Unis, 35 millions de personnes n'ont aucune couverture maladie, et ceux qui en ont une sont tellement mal couverts qu'ils se retrouvent dans une situation catastrophique dès qu'ils ont un pépin qui dépasse le simple rhume. Parce que les assurances, qui sont des entreprises privées, vont chercher, et trouver toutes sortes d'arguties juridico-médicaux pour ne pas payer. On va dire que la victime d'un accident de la route, transportée à l'hôpital inconsciente, ne se verra pas remboursée de ce transport car elle n'a pas obtenu d'agrément préalable de l'assurance, ou on va laisser mourir (littéralement) un cancéreux car la greffe de moelle qui pourrait le sauver est considérée comme un "traitement expérimental" (et donc non-couvert) par l'assurance. On va fouiller à posteriori dans les dossiers médicaux des patients à la recherche d'un trouble qu'ils auraient oublié de déclarer lors de leur inscription (seuls les maladies graves doivent être déclarées, mais le film donne un exemple où une mycose est considéré par l'assurance comme une maladie grave, et elle casse donc son contrat, avec effet rétroactif, puisque la patiente a "menti sur son état de santé". Elle devra donc rembourser le coûteux traitement médical qu'elle venait de se faire rembourser).
Le véritable malheur, c'est que l'Etat autorise ce type de pratique, autorise les assurances à passer outre les traitements proposés par les médecins en qualifiant certains traitements "d'expérimentaux" ou permette qu'on qualifie une mycose de "maladie grave". Le film montre clairement le cynisme de Nixon, qui a créé ce système délibérement pour permettre à ses amis assureurs de s'enrichir. Une preuve de plus que quand le monde politique et le milieu des affaires sont trop étroitement mêlés, il n'en ressort rien de bon pour le pays et le peuple.
Une dernière chose à propos de "Sicko" : Allez le voir !
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