Monday, December 10, 2007

La fin de la liberté de la presse en France

Un évènement est passé quasiment inaperçu dans les médias, c'est l'arrestation, jeudi dernier, de Guillaume Dasquié, journaliste indépendant, travaillant entre autre pour Le Monde, mais aussi cofondateur de geopolitique.com.

Il est reproché à Guillaume Dasquier d'avoir révélé, dans un article du Monde, des documents internes classifiés prouvant que la DGSE avait prévenu la CIA d'un danger d'attaque sur des batiments avec des avions de ligne bien avant le 11 septembre 2001, ainsi que d'avoir publié des documents du ministère des affaires étrangères portant sur l'affaire Borrel, ce juge mort à Djibouti en 1995 dans des circonstances plus que troubles.

Ces faits constitueraient, d'après Laurence Abgrall, magistrate chargée de l'affaire, un délit de violation du secret de la Défense nationale (articles 413-9 et 413-11 du Code pénal).

D'après Guillaume Dasquié, l'objectif réel de l'arrestation était de le pousser à révéler ses sources, malgré l'article 109 du Code de procédure pénale qui prévoit qu'un journaliste a la possibilité de préserver la confidentialité de ses sources.

Il affirme avoir subi un chantage à l'incarcération pour le pousser à "se mettre à table", et a bel bien révélé le nom d'une de ses sources. Personnellement, je ne le blâmerais pas pour ça. On imagine facilement que les hommes de la DST savent se montrer "convaincants"...

Au-delà du respect du secret des sources, je trouve que cette affaire montre un problème bien plus profond : L'utilisation abusive du secret défense. Pour moi, si les Etats-Unis ont été avertis plusieurs mois à l'avance de l'attaque qui a eu lieu le 11 septembre 2001, les citoyens, français et américains, ont le droit de la savoir ! Et je ne comprends même pas ce qui peut justifier que des documents liés à l'affaire Borrel, qui est en principe une affaire de droit commun, puissent être classifiés. Ca veut dire que ces documents n'ont pas été communiqués à la justice ?

Cette forme de pression sur les journalistes est un phénomène dont le retour en France est tout à fait récent et très inquiétant, et je me demande si on peut encore dire que la liberté de la presse existe en France après un tel évènement, dont le but quasi assumé (puisqu'il fait suite au mécontentement des Etatsuniens après ces révélations) est de faire taire un journaliste.

L'interview de Guillaume Dasquié sur France 5, samedi 8 décembre. Attention, c'est un peu éprouvant. Le journaliste, qui sort de 40 heures de garde à vue, est visiblement sous le choc. Une scène comme on ne pensait pas en voir un jour en France :


Vous, je ne sais pas, mais moi, ça me fait peur.

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